La Tour de L'Abbaye


  • Elle fut construite au début du XIVe siècle, au plus tôt à partir de 1324, par Aymon de Montferrand de La Sarraz qui tenait à asseoir plus solidement son autorité sur le couvent de L'Abbaye dont l’église était dédiée à Sainte Marie-Madeleine, patronne du lac. La Tour, sans être un bâtiment religieux, fit néanmoins partie désormais du complexe conventuel de L'Abbaye du Lac-de-Joux.

    Cet ouvrage, que l’on pourrait qualifier de militaire, d’aspect massif et austère, s’aperçoit de loin. Il figure depuis bientôt près de deux siècles sur nombre de gravures et peintures dédiées au village de L'Abbaye dont il est devenu en quelque sorte le symbole.

    La Tour proprement dite accuse 7 mètres sur 7 à la base. Des éperons de types différents en protègent les angles vifs. Sa maçonnerie fait une douzaine de mètres de hauteur. On raconte, mais sans preuve, qu’autrefois la Tour était beaucoup plus haute qu’aujourd’hui, ayant pu aller jusqu’à 20 mètres. Cette situation reste hypothétique.

    La Tour et l’église furent incendiées par la foudre le 10 septembre 1654 « par la volonté de Dieu ». Les cloches fondirent par la même occasion. On ignore totalement comment les édifices ont été reconstruits après ce sinistre.
    Nouvel incendie en 1741, avec destruction de la pendule installée à la fin du siècle précédent, de même que les cloches. Les nouvelles campagnes, ainsi que la deuxième pendule telle qu’on peut la trouver sur place encore aujourd’hui, sont de cette époque. Il en est de même pour la charpente et pour les escaliers d’accès.
    Et si le vieux village de L'Abbaye passa à son tour par les flammes en 1966, cette fois-ci la Tour fut épargnée. Elle put vieillir en silence et se dégrader peu à peu, d’où une revalorisation aujourd’hui nécessaire.

    Signalons encore, en ce qui concerne l’intérieur, tout en haut de la partie maçonnée de la Tour se trouvent des baies géminées sur les quatre faces. De là-haut la vue sur cette extrémité nord-est de La Vallée est superbe. Il y a en particulier un coup d’œil magnifique sur le lac et la colline des Epinettes ou du Revers. Et c’est sans aucun doute le plus grand intérêt que cette vue soit restée telle qu’elle apparaissait aux abbés qui se rendaient en ces hauteurs pour admirer l’étendue de leur domaine. Mais les temps étaient proches où, suite à l’invasion du Pays de Vaud en 1536 par LL.EE. de Berne, ils devraient faire leurs valises!

    C’est à l’occasion de leur départ que fleurit le joli conte de la Cloche d’Argent! Ainsi quittant les lieux par barque afin de traverser le lac pour s’en aller en direction de la frontière, l’un des fugitifs emmena avec lui ladite cloche que l’on sonnait une fois l’an, le matin de Pâques. Hélas, la barque étant trop chargée, la cloche sombra dans le lac où elle se perdit. Elle y est encore! Seulement, à ce qu’il paraît, il lui arrive de sonner. Mais voilà, pour l’entendre, il faut avoir le cœur d’un saint ou celui d’un enfant, et surtout avoir les oreilles d’un poète!

    Rémy Rochat,
    historien